Interview : Dominique Caelen
Dominique Caelen, directrice générale d’Audace Digital Learning.
D’où vient le nom Audace Digital Learning ?
L’agence Audace est née d’un spin-off de l’agence de communication interne du groupement FOCI, spécialisé dans la photographie, qui a disparu depuis. Son dirigeant, Jean-Paul Chantry, a estimé que sortir du giron d’un groupement alors important, l’agence de communication, pour en faire une entrepris indépendante était une démarche audacieuse et a donc décidé de nommer la société Audace.
Lorsque, en 2008, nous avons racheté l’entreprise avec Jérôme Poulain, nous avons trouvé que ce nom illustrait parfaitement notre projet de faire totalement basculer Audace en une entreprise de Digital learning et nous l’avons gardé. Je dois également ajouter que nous voulions également capitaliser sur la notoriété et l’image acquise dans le domaine.
Comment une agence de communication devient une référence de l’Immersive Learning ?
Quand nous avons racheté Audace, en 2008 donc, l’entreprise avait 2 activités. La première était la communication, domaine que je maîtrisais bien. La seconde, la création de Digital Learning. Avec Jérôme, nous avons décidé de conserver l’activité communication mais, surtout, de développer l’activité Digital Learning. D’autant qu’Audace avait déjà un client de poids : ArcelorMittal. L’équipe avait réalisé des modules e-learning, des Serious Games et même un premier simulateur en réalité virtuelle pour ce géant de la métallurgie. Nous avons donc capitalisé et développé cette expertise au fil des années. Aujourd’hui, l’équipe est composée de 30 personnes, toutes en interne, qui excellent dans leur domaine.
Les problématiques industrielles semblent au cœur de votre activité, est-ce votre seul domaine d’expertise ?
Travailler pour le secteur industriel fait partie de notre ADN puisque c’est à la suite de la sollicitation d’ArcelorMittal que nous avons démarré dans ce métier. Après cette première collaboration d’envergure, d’autres industriels nous ont contactés. Parmi eux, Orano (anciennement Areva) qui nous demandé de concevoir un simulateur de conduite de pont polaire. Il faut croire que le résultat était à la hauteur de leurs attentes puisque cela fait maintenant presque 15 ans que nous travaillons ensemble. Un succès en appelant un autre, nous avons ensuite travaillé pour Total Energies, Naval Group et bien d’autres.
Pour autant, nous ne nous sommes pas cantonnés au secteur industriel. Nous nous sommes également développés dans le secteur médical. Tout a commencé par un appel à projets régional qui nous a permis de concevoir le premier Serious Game dédié au monde infirmier. Il portait sur les problématiques de la transfusion sanguine. Bien que le succès commercial n’ait pas vraiment été au rendez-vous, son aspect avant-gardiste, nous a assuré une véritable reconnaissance du secteur. Par la suite, nous avons réalisé de nombreux e-learning, des Serious Games et, maintenant, de la réalité virtuelle avec un gros projet pour l’APHP.
Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur les formations que vous concevez ?
Nous travaillons sur tous les grands thèmes de l’amélioration de la performance opérationnelle. Evidemment, du fait de notre ADN industriel nous concevons de nombreuses formations techniques, gestes métiers et sécurité. Nous abordons aussi des sujets de prise de poste et d’Onboarding. Pour Bridgestone, nous avons récemment simulé toute une ligne de fabrication de pneus qui permet aux nouveaux entrants de se former en réalité virtuelle. Grâce au simulateur, ils se forment aux gestes techniques au rythme qu’il faut, avant de passer à la machine réelle. Acquérant les bons gestes et la maîtrise des différentes phases du processus de fabrication, leur confiance en soi s’améliore, de même que leur prise de poste. Cette innovation est intégré à un parcours complet de formation qui a permis d’augmenter la productivité ainsi que la sécurité des employés en réduisant de 30 à 50 % les incidents de sécurité et les problèmes de non-qualité. Par ailleurs, d’importantes économies d’échelle ont été réalisées, notamment, l'immobilisation des moyens matériels de production requis pour la formation a été diminuée de 80% et l'immobilisation des moyens humains de 90%. Bien d’autres impacts positifs se sont révélés, par exemple, l’attractivité du poste avec des nouveaux profils de candidats (des femmes postulent désormais) et l’image de l'entreprise valorisée par des prix (Trophée du Digital Learning, Laval Virtual award,…) et des articles dans les médias…
Quelles technologies utilisez-vous pour vos modules immersifs ?
Tout dépend de l’objectif du module. Nous utilisons aussi bien la réalité virtuelle que la réalité mixte ou la réalité augmentée. Pour ce qui est de la représentation, nous pouvons utiliser des photos ou des vidéos 360° mais, généralement, nous concevons des univers en 3D temps réel. C’est bien plus précis et efficace pour les simulations qui nécessitent une reconstitution complète d’univers et, surtout, de véritables interactions avec le matériel et les personnels présents sur le site virtuel.
Notre maîtrise de la 3D temps réel nous permet même de proposer des métavers. Ce que j’entends par là, c’est que plusieurs apprenants peuvent agir et interagir simultanément dans le même environnement. Nous avons, par exemple, reconstitué une halle logistique où les apprenants peuvent se former à leurs missions quotidiennes et réagir correctement aux aléas qui pourraient survenir, comme un piéton qui circule là où il ne devrait pas…
Selon vous, quels sont les avantages et les limites des technologies immersives en matière de formation ?
Pour nous, les avantages des technologies immersives sont, comme aime les résumer Jérôme Poulain, les « 4 R » :
- Risques - avec les technologies immersives, il est possible de former aux risques sans mettre les personnes en danger. Par exemple, pour Orano, la VR permet de former les équipes à intervenir dans des environnements radioactifs sans risque d’irradiation.
- Reproduire - outre la possibilité de reproduire précisément les environnements, la VR permet surtout de reproduire fidèlement la plupart des gestes métiers ; cela peut être particulièrement intéressant quand un opérateur doit s’entraîner pour maîtriser toute la technicité d’une opération sensible.
- Répétition - les technologies immersives permettent de répéter une procédure ou un geste à l’infini… pour un coût « fixe » et raisonnable. C’est idéal lorsqu’on doit former un grand nombre de personnes à une procédure, à des gestes métiers.
- Rareté - les technologies immersives permettent de pallier la rareté de certains éléments de formation. Il peut s’agir d’environnements, de matières premières ou même de formateurs.
Pour ce qui est des limites, je trouve qu’elles sont de moins en moins nombreuses. Tout d’abord, parce que les casques sont devenus réellement abordables. Ensuite, parce que la majorité des maux qui frappaient les précédentes générations de casques, comme la cinétose, ont disparus. Enfin, le déploiement de formations à grande échelle est bien plus simple. Différents outils permettent de gérer sa flotte de casques, que ce soit les droits utilisateurs, les mises à jour, les contenus. Il est désormais possible de superviser plusieurs apprenants simultanément et d’assurer la protection des données de l’entreprise. Certes, tout n’est pas parfait mais les différents acteurs, à commencer par les constructeurs, ont bien conscience des enjeux.
Qu’est-ce qui vous a incité à proposer des formations immersives sur étagère ?
Cela fait maintenant près de 7 ans que nous proposons des formations immersives sur étagère. Nous avons fait ce choix car nous étions régulièrement contactés par des entreprises qui souhaitaient utiliser nos simulateurs de conduite d’engins. Alors, plutôt que de réinventer le fil à couper le beurre à chaque fois et pour rendre nos produits plus accessibles, nous avons décidé de créer des formations standards. Aujourd’hui, nous avons toute une gamme de simulateurs qui vont du chariot élévateur à la conduite de grue auxiliaire en passant par la grue de montage automatisée.
Est-ce une gamme de produits que vous comptez développer ?
Nous constatons un intérêt grandissant pour nos simulateurs de la part du monde de l’éducation. Pour de nombreux lycées professionnels, il est compliqué et dangereux de mettre leurs élèves aux commandes de ce type d’engins, s’ils n’ont pas suivi une formation préalable. La demande est également de plus en plus importante pour le secteur médical. Tout cela fait que notre gamme de simulateurs immersifs sur étagère devrait s’étoffer de nouveaux modules, dans les mois à venir.
Pouvez-vous nous parler de la feuille de route d’Audage Digital Learning pour 2024-2025 ?
Nous comptons suivre notre trajectoire actuelle. Nous allons continuer à développer notre activité sur le secteur de la santé et dans la production de Serious Games. Après les avoir boudés, les entreprises montrent un véritable regain d’intérêt pour les Serious Games. Ca tombe bien car nous sommes convaincus que l’on apprend mieux grâce à la ludopédagogie. Nous allons, d’ailleurs, soutenir une thèse sur ce thème avec l’Université de Franche Comté.
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